SECTION 5 : LES PRINCIPES DE BENEFICENCE ET DE NON-MALFACTION
‘Primum non nocere ; avant tout… ne pas nuire’.
— Un principe médical fondamental (issu du serment d’Hippocrate ; voir annexe B.)
RÉSULTATS D’APPRENTISSAGE
Après avoir lu cette section du cours, vous devriez être en mesure de :
- Comprendre la signification des principes de bienfaisance et de non-malfaisance.
- Évaluer les mérites relatifs d’une justification conséquentialiste et déontologique des principes de bienfaisance et de non-malfaisance.
- Apprécier certaines des difficultés liées à l’évaluation des bénéfices et des préjudices.
- Apprécier dans les problèmes éthiques où l’on pourrait supposer qu’il y a un conflit entre les exigences du principe d’autonomie d’une part et les principes de bienfaisance et de non-malfaisance d’autre part.
POINTS CLÉS
- Les principes de bienfaisance. Il convient de promouvoir le bien-être ou le bénéfice de l’individu.
- Le principe de non-malfaisance. On ne doit pas faire de mal.
- La justification conséquentialiste des principes de bienfaisance et de non-malfaisance.
Sont-ils vraiment aux deux extrémités d’un continuum allant de —
1. promouvoir le bénéfice, à
2. supprimer le préjudice, à
3. prévenir le mal, à
4. ne pas infliger de mal ?
- Devons-nous passer tout notre temps à remédier au mal ?
- Selon les théories déontologiques, le devoir de non-malfaisance est un devoir parfait qui n’admet aucune exception.
- Selon les théories déontologiques, le devoir de bienfaisance est un devoir imparfait où nous pouvons consulter nos inclinations sur les personnes à qui nous devons profiter.
- Qu’est-ce qui doit compter comme bénéfice et préjudice, et qui doit faire l’évaluation ?
- Le principe de bienfaisance entre-t-il en conflit avec le principe d’autonomie ?
5.I QUELS SONT LES PRINCIPES DE BIENFAISANCE ET DE NON-MALFAISANCE ?
Comme nous l’avons vu dans les exemples précédents, le principe d’autonomie n’est pas le seul principe auquel il est fait appel dans les décisions relatives aux soins de santé. Il est également fait appel aux principes de bienfaisance et de non-malfaisance (voir ET1008 : section 12.1.2, section 15.3.1, 15.3.2 et 15.3.3). L’exemple suivant illustre tous ces principes à l’œuvre.
L’EXEMPLE DU NOUVEAU MÉDICAMENT
Il existe un nouveau médicament qui devrait donner une excellente chance de rémission à un individu atteint de leucémie. Cependant, ce médicament n’a pas encore été évalué sur le long terme, de sorte qu’il pourrait y avoir un risque d’effets secondaires nocifs, encore inconnus. Le consultant estime que le nouveau médicament devrait être prescrit. La discussion sur la possibilité de risques doit être omise au motif que la personne n’aurait pas les compétences médicales suffisantes pour les évaluer. Le consultant est le mieux placé pour déterminer quel est le meilleur traitement pour la personne. L’infirmière considère que les options de traitement devraient être pleinement discutées avec la personne et que celle-ci a le droit de décider du traitement.
Le consultant fait appel au principe de bienfaisance puisque l’hypothèse est que le nouveau médicament sera pour le bénéfice ou le bien-être de la personne. Le consultant apprécie également la pertinence du principe de non-malfaisance (on ne doit pas nuire), puisque le risque d’éventuels effets secondaires nocifs a été pris en compte. L’infirmière donne la priorité au principe d’autonomie car il est considéré comme un domaine dans lequel l’individu a le droit d’être autonome. L’individu a le droit de recevoir des informations suffisantes sur les traitements possibles disponibles et de décider ensuite du traitement à suivre.
5.2 JUSTIFICATIONS DES PRINCIPES DE BENEFICENCE ET DE NON-MALFAISANCE
Comme pour le principe d’autonomie, nous devons examiner comment les principes de bienfaisance et de non-malfaisance pourraient être justifiés en termes conséquentialistes et déontologiques (voir ET1008 : Section 12.3, Section 13.2 et 13.3, Section 15.3 et 15.4, Section 16.2 et Section 17.4).
5.2.1 Justification conséquentialiste
Un seul principe ?
On pourrait faire valoir qu’en réalité nous n’avons qu’un seul principe ici et que promouvoir le bien-être et ne pas nuire représentent simplement les extrémités opposées d’un continuum. C’est la position généralement adoptée par ceux qui justifient ces principes en termes conséquentialistes (voir ET1008 : section 13.2). Aussi, le serment d’Hippocrate les énumère ensemble:
‘ J’utiliserai le traitement pour aider les malades selon ma capacité et mon jugement, mais je ne l’utiliserai jamais pour les blesser ou leur faire du tort. ‘ (voir annexe B.)
La raison de dire que ces deux principes pourraient représenter deux extrémités d’un continuum devient évidente si l’on commence à se demander ce qu’implique la promotion du bienfait. Si l’on adopte une position conséquentialiste hédoniste telle que celle défendue par Mill, la promotion du bien implique de chercher à maximiser le plus de bonheur possible. Selon Singer, promouvoir le bien implique de maximiser la satisfaction des intérêts. Nous devrions accomplir des actes positifs pour promouvoir ce qui est considéré comme un bénéfice.
Cependant, en plus d’actes tels que ceux-ci qui relèvent de toute évidence du principe de bienfaisance, nous avons également des actes dont on pourrait dire qu’ils promeuvent le bénéfice en supprimant le malheur ou les états de fait où les intérêts ne sont pas satisfaits. Il est possible que la majorité des interventions en matière de santé soient de cette nature puisqu’elles tentent de supprimer une cause de malheur et se conforment ainsi au principe de bienfaisance. Les traitements sont conçus pour bénéficier à un individu en guérissant une condition qui nuisait à son bien-être.
Troisièmement, nous avons les actes, dont on pourrait également dire qu’ils relèvent du principe de bienfaisance, qui sont conçus pour promouvoir le bien-être en prévenant les dommages. Les progrès de la médecine préventive en fournissent une illustration claire, dont un exemple évident est le programme d’immunisation.
De la prévention des préjudices, fait-on valoir, il n’y a qu’un pas vers le principe de non-malfaisance qui préconise que nous ne devrions pas infliger de préjudice. Nous profitons des individus en ne leur faisant pas de mal. En effet, Mill lorsqu’il formule son Principe d’utilité (voir section 2 : 2.3), décrit le bonheur comme le plaisir et l’absence de douleur.
Un argument que l’on pourrait avancer pour nier l’existence d’un continuum entre le Principe de bienfaisance et le Principe de non-malfaisance est que le champ d’application des deux principes est différent. Le second principe s’applique à tout le monde, contrairement au premier. Nous n’avons pas le devoir de bénéficier à tout le monde bien que nous ayons le devoir de ne nuire à personne.
Cependant, c’est précisément ce point que les théories conséquentialistes nient. Elles considèrent que nous avons le devoir de produire autant de bien que possible et donc que le champ d’application des principes est tout aussi large. Tout comme il serait mal de faire du mal à quelqu’un, par exemple en l’assassinant, de la même manière, nous avons le devoir de faire beaucoup plus de bien dans le monde que ce n’est le cas actuellement. Par exemple, en ne donnant pas plus à la charité, nous permettons à de nombreuses personnes de mourir, ce qui est tout aussi mauvais que de tuer quelqu’un. Après tout, nous évaluons le bien ou le mal de nos actions par les conséquences de nos actions et les conséquences peuvent être produites par des omissions comme par des actes.
Jonathan Glover est l’un de ceux qui soutiennent ce genre de point de vue, mais il le tempère en suggérant que nous devons élaborer des priorités dans notre vie. Il écrit :
‘ L’approche morale préconisée ici ne nous engage pas, de manière absurde, à remédier à tout le mal dans le monde. Elle ne nous engage même pas à passer tout notre temps à essayer de sauver des vies. Ce que nous devrions faire, c’est déterminer quelles sont les choses les plus importantes, puis essayer de voir où nous avons nous-mêmes une contribution à apporter. ‘ 1
Ce genre de position est examiné dans la section 7, lorsque nous nous penchons sur la doctrine des actes et omissions.
Si nous supposons pour le moment que nous pouvons faire une distinction entre les actions positives et les omissions, alors nous pourrions énumérer les actes de faire le bien, de supprimer le mal et de prévenir le mal comme étant appropriés au domaine de la bienfaisance, laissant seulement le devoir de ne pas infliger de mal (omission) dans la province du principe de non-malfaisance.
5.2.2 La justification déontologique
Compris de cette manière, il est soutenu par les partisans des théories déontologiques qu’il existe une différence importante entre le Principe de Bienfaisance et le Principe de Non-malfaisance. Kant, par exemple, parle du devoir de non-malfaisance comme d’un devoir parfait et du devoir de bienfaisance comme d’un devoir imparfait.
Kant définit un devoir parfait comme `un devoir qui ne permet aucune exception dans l’intérêt de l’inclination’. 2 Ce qu’il entend par là peut être illustré par l’exemple du suicide qui a été utilisé dans la section 4. Puisque le devoir de non-malfaisance, c’est-à-dire le fait de ne pas faire de mal, est un devoir positif, même si nous avons une forte envie de mettre fin à nos jours, cela ne nous donne pas le droit de nous suicider et de faire une exception au principe de non-malfaisance. Cependant, dans le cas de devoirs imparfaits, tels que le principe de bienfaisance, nous pouvons consulter nos inclinations dans le sens où il nous appartient, dans une certaine mesure, de décider qui aider. Si un médecin ou une infirmière souhaite aider à soigner les orphelins en Roumanie, il ou elle n’est pas condamné(e) sous prétexte que, par exemple, les besoins sont plus importants en Irak. Il y a une certaine latitude pour décider qui l’on va aider, mais le devoir de ne pas nuire est applicable universellement.
Cette distinction reflète une intuition de bon sens assez répandue selon laquelle les devoirs parfaits, comme le devoir de non-malfaisance, sont plus rigoureux que les devoirs imparfaits. En d’autres termes, notre devoir de ne pas nuire est plus grand que notre devoir de bénéficier. Par conséquent, en cas de conflit entre la bienfaisance et la non-malfaisance, la non-malfaisance l’emportera normalement sur la bienfaisance. Prenons un exemple quelque peu frivole. Il existe un individu qui pourrait donner deux de ses organes à deux autres individus et ainsi sauver leur vie au détriment de la sienne. Le devoir de ne pas infliger de préjudice à cet individu au profit des deux autres primera ici. Il est intéressant de noter qu’un conséquentialiste pourrait être amené à prendre une décision différente puisque les conséquences de deux vies sauvées par rapport à une seule pourraient sembler faire de l’action de prélever les organes la bonne action.
5.3 DESCRIPTION DES CAS
Bien que l’intuition du bon sens puisse établir ce genre de distinction entre le principe de bienfaisance et le principe de non-malfaisance, il existe un problème dans certains cas pour décider quel principe est applicable.
Par exemple, considérons un cas 3 où un homme a accepté de subir des tests en vue d’un don de moelle osseuse. Les tests révèlent la compatibilité de la moelle osseuse. L’individu change alors d’avis pour ne pas poursuivre le don. Comment décrire ce cas ? Quel est le devoir du donneur envers le receveur potentiel de la moelle osseuse ? S’agit-il d’un devoir de bienfaisance, puisqu’il supprimera le préjudice, ou faut-il le décrire comme relevant du principe de non-malfaisance, puisque décider de ne pas donner de moelle osseuse après avoir accepté précédemment revient à infliger un préjudice ? Si les théories déontologiques sont correctes, cela fera une différence. S’il est décrit comme un devoir de bienfaisance, il n’a pas la rigueur du devoir de non-malfaisance. Le donneur potentiel ne serait pas obligé d’aller de l’avant avec le don. Pour les conséquentialistes, la description de l’action ne ferait vraisemblablement pas de différence quant au caractère obligatoire ou non de l’action. Les conséquences seraient les mêmes quelle que soit la description et les actions sont évaluées comme étant bonnes ou mauvaises en fonction de leurs conséquences.
Un autre domaine dans lequel la description de l’action pourrait déterminer si le cas est considéré comme relevant du principe de bienfaisance ou du principe de non-malfaisance est celui de l’avortement. Si nous supposons que nous avons un individu, dès le moment de la conception, auquel il est possible de nuire (voir section 3.4.2), quel devoir avons-nous envers cet individu ? Disons-nous que nous lui devons un devoir de non-malfaisance et que, par conséquent, un avortement serait mauvais puisque nous faisons du tort au fœtus en le tuant ? Ou bien disons-nous que le principe de bienfaisance nous laisse la latitude de décider à qui nous profitons et que nous ne sommes pas obligés de profiter à cet individu en particulier ? 4 Bien que nous ayons le devoir de bénéficier, nous n’avons pas le devoir de bénéficier à quelqu’un en particulier et lorsque nous décidons de bénéficier à un individu particulier, cela est plus précisément décrit comme un cas de surérogation, au-delà de l’appel du devoir.
Bien sûr, dans le domaine des soins de santé, on pourrait argumenter qu’en devenant un professionnel de la santé, on a assumé le devoir de bénéficier aux individus qui vous consultent. Cependant, il s’agit encore d’une limitation du champ d’application du principe de bienfaisance puisque ce devoir n’est pas dû à tout le monde.
5.4 ÉVALUATION DES BÉNÉFICES ET DES DOMMAGES
Un problème majeur de l’application des principes de bienfaisance et de non-malfaisance concerne la manière dont les bénéfices et les préjudices doivent être évalués. Qu’est-ce qui doit être considéré comme un bien-être, qu’est-ce qui doit être considéré comme un préjudice et de quel concept de préjudice et de bénéfice devons-nous tenir compte ? Le concept de l’équipe de soins de santé de ce qui compte comme un préjudice ou un avantage pourrait bien différer de l’opinion de l’individu qui fait l’objet de ses soins.
Il est important, lors de l’examen de cet éventail de problèmes, de reconnaître que le bien-être et le préjudice sont des termes évaluatifs. Les préjudices et les avantages ne sont pas des choses dont on peut objectivement déterminer la présence. Ce n’est pas comme déterminer le nombre de personnes présentes dans une pièce ou si une lumière est allumée ou non. Ils dépendent plutôt de l’évaluation de la situation par un individu. Le fait d’infliger la mort, qui peut être considéré comme le mal ultime pour un individu, peut être considéré par certaines personnes dans certaines situations comme un bienfait. Les demandes sérieuses d’euthanasie indiquent que l’évaluation que la personne fait de sa propre vie l’amène à considérer la mort comme un bienfait plutôt qu’un mal.
Dans un cas moins extrême, une procédure chirurgicale visant à amputer une main pourrait être envisagée, car l’alternative consistant à essayer de la sauver entraînera une grande douleur et mettra également le reste du bras en danger. En termes de probabilités de succès indiquées par des cas similaires dans le passé, le meilleur plan d’action sera d’amputer la main. Cependant, il est nécessaire que l’individu évalue lui-même ce que ces alternatives signifient pour sa vie. Un pianiste de concert pourrait bien penser qu’il vaut la peine de prendre le risque d’essayer d’éviter l’amputation en raison de son style de vie. Ce cas illustre deux points :
1. Premièrement, que les avantages et les inconvénients doivent être évalués les uns par rapport aux autres.
2. Deuxièmement, que la conclusion à laquelle on aboutit à la suite de cette pesée pourrait bien différer d’un individu à l’autre, selon la façon dont ils considèrent ce qui compte pour eux comme du bien-être.
5.5 LE PRINCIPE D’AUTONOMIE ET LE PRINCIPE DE BENEFICENCE
Ce dernier point met en évidence le problème de ce qu’il faut faire lorsqu’il y a un conflit entre la pesée des avantages et des inconvénients par l’équipe soignante et la pesée des avantages et des inconvénients par l’individu (voir ET1008 : section 16.2.1 et 16.2.3). Dans l’exemple du « nouveau médicament », nous avons vu que le consultant a pesé les avantages et les inconvénients des différents traitements. Cette démarche pourrait être qualifiée de paternaliste, puisqu’il s’agit de l’évaluation par le professionnel de santé de ce qui serait bénéfique pour l’individu. Littéralement, le professionnel de santé agit comme un père en faisant ce qu’il considère comme le mieux pour l’individu et en supposant qu’il est approprié de prendre certaines de ces décisions pour cet individu. Dans ce cas, l’individu n’a pas été consulté sur les options de traitement. Cependant, il existe des cas où l’individu est consulté et où son évaluation des avantages et des inconvénients diffère de celle des soignants. Faut-il toujours donner la priorité à l’évaluation de l’individu ou l’intervention paternaliste est-elle justifiée dans certains cas ? En d’autres termes, que disons-nous des cas où le principe de bienfaisance semble dicter une ligne de conduite, mais où cette prescription entrerait en conflit avec les exigences du principe d’autonomie ?
Le point de vue que nous défendons est que l’autonomie devrait toujours primer sur ces autres principes, mais que la question difficile à trancher est de savoir si l’individu peut être considéré comme autonome dans chaque cas individuel. Comme nous l’avons soutenu dans la section 4, les caractéristiques nécessaires à l’autonomie varieront en fonction de la complexité de la décision requise, mais cela laisse encore de la latitude pour des divergences d’opinion sur l’application ou non du principe d’autonomie dans un cas individuel.
Par exemple, si quelqu’un adopte un plan de vie qui, selon nous, n’est pas le type de plan de vie qu’un individu rationnel adopterait, sommes-nous fondés à nier que cet individu est autonome ? À d’autres égards, l’individu pourrait faire preuve de rationalité dans la poursuite de ce projet de vie. Un individu pourrait choisir des moyens appropriés pour atteindre la fin qu’il a adoptée, et son adhésion à cette fin pourrait être cohérente avec d’autres aspects de sa vie. En d’autres termes, elle présenterait deux caractéristiques qui indiquent la rationalité, mais on juge que le plan de vie qu’elle a adopté rend approprié le refus d’appliquer le principe d’autonomie dans ce cas particulier. Un tel exemple est donné par Beauchamp et Childress 5, où un individu est admis dans un établissement psychiatrique au motif que le plan de vie qu’il a adopté implique l’automutilation. Leur croyance en Dieu les a amenés à penser que Dieu exige ces sacrifices de leur part afin de prévenir un préjudice encore plus grand pour le reste de l’humanité.
Le danger d’autoriser une évaluation paternaliste des plans de vie est que cela permettrait de nier que l’individu est capable d’une décision autonome. Cela permettrait donc la possibilité d’une intervention paternaliste justifiée. Bien entendu, si le principe d’autonomie ne s’applique véritablement pas, une intervention paternaliste justifiée par le principe de bienfaisance pourrait être appropriée. La justification serait que l’individu traité est incapable de juger lui-même, dans le cas particulier, de ce qui lui serait bénéfique. Le paternalisme n’est donc pas préconisé ici en opposition à la reconnaissance de l’autonomie, car il est supposé que le principe d’autonomie n’est pas applicable. Lorsque le Principe d’autonomie est applicable, alors celui-ci devrait avoir la priorité.
Le Principe d’autonomie l’emporte à juste titre sur le Principe de bienfaisance et, en fait, sur le Principe de non-malfaisance pour la raison suivante. Si un individu possède les caractéristiques nécessaires pour exercer son autonomie dans un cas particulier, cela implique la capacité de juger ce qui est bénéfique ou nuisible pour cet individu. Étant donné que nous avons soutenu que le bien-être et le préjudice sont des termes évaluatifs, l’évaluation d’un individu qui est capable de faire une évaluation de ce qui constitue le bien-être ou le préjudice pour lui devrait être la cour d’appel finale. Cela se justifie à la fois pour des raisons déontologiques et conséquentialistes. Cette dernière justification consisterait à faire valoir que les conséquences sont les meilleures si l’on préconise cela, puisque la détermination de ce qui compte comme un bon résultat a été faite par l’individu concerné. Une justification déontologique consiste à mettre en avant la valeur intrinsèque de l’exercice de l’autonomie (voir section 4.2.2)
Ce dernier point souligne que nous n’avons un potentiel de conflit entre le principe de bienfaisance et le principe d’autonomie que si nous combinons le principe de bienfaisance avec une évaluation paternaliste des avantages et des inconvénients. Si l’évaluation des avantages et des inconvénients par l’individu est associée au principe de bienfaisance, elle est conforme au principe d’autonomie. L’individu décidera de faire ce qu’il considère être le plus bénéfique pour lui.
EXERCICES D’APPRENTISSAGE
1. Les principes de bienfaisance et de non-malfaisance sont-ils totalement distincts ou se situent-ils simplement à différentes extrémités d’un continuum ? Donnez un exemple de dilemme éthique dans les soins de santé où la réponse à cette question conduirait à des évaluations différentes.
2. Le principe de bienfaisance peut-il jamais entrer en conflit avec le principe d’autonomie ?
1. Glover, J. (1982) Causing Death and Saving Lives. Penguin Books, Londres, p105.
2. Kant, I. `Groundwork of the Metaphysic of Morals’. Dans H.J. Paton (ed) (1948) The Moral Law. Hutchinson University Library, Londres, p85.
3. Beauchamp, T.L. et Childress, J.F. (1983) Principles of Biomedical Ethics (2nd edn). Oxford University Press, Oxford, pp315-16.
4. Jarvis Thomson, J. (1986) `A Defense of Abortion’. Dans P. Singer (ed) Applied Ethics. Oxford University Press, Oxford, pp37-56.
5. Beauchamp et Childress, op. cit. pp295-6.
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