Discussion

La production de toux peut résulter de réponses physiologiques volontaires ou involontaires. La réponse involontaire (ou toux réflexe) est déclenchée par des récepteurs de la toux situés dans la bifurcation des voies respiratoires, le larynx et l’œsophage distal.5 Les récepteurs de la toux sont connectés à des fibres nerveuses afférentes qui proviennent du nerf vague et conduisent les signaux au noyau tractus solitarius dans le tronc cérébral, puis au centre de la toux, qui transmet les signaux en une réponse efférente à la toux.6 Il existe 3 types de récepteurs de la toux, définis par leurs propriétés conductrices : (1) les récepteurs à adaptation rapide, (2) les récepteurs à adaptation lente et (3) les fibres C.7,8 Les récepteurs à adaptation rapide sont sensibles à la fumée de cigarette, aux produits chimiques acides et alcalins, et à la stimulation mécanique des maladies pulmonaires chroniques.9,10 En revanche, les fibres C sont stimulées par des irritants tels que la bradykinine (un médiateur libéré lors d’une inflammation) et la capsaïcine (un extrait vanilloïde de poivrons).11 Le récepteur potentiel transitoire vanilloïde-1 (TRPV-1) est un récepteur de la capsaïcine que l’on retrouve sur les récepteurs à adaptation rapide et les fibres C. Il répond également à la chaleur, à l’acide et à l’oxygène. Il répond également à la chaleur, à l’acide, à la bradykinine, aux dérivés de l’acide arachidonique et à l’adénosine triphosphate.12 Il a été démontré que le TRPV-1 est augmenté chez les patients souffrant de toux chronique.13 En outre, les patients souffrant de toux chronique ont une sensibilité accrue à la capsaïcine inhalée par rapport aux sujets normaux.14 Par conséquent, on s’intéresse actuellement au ciblage des canaux des récepteurs vanilloïdes en tant que traitement potentiel pour les patients atteints de toux chronique.15

La toux est un symptôme respiratoire courant et constitue souvent le principal motif de consultation des pneumologues et des médecins respiratoires.16 La syncope associée à la toux, en particulier, est une condition alarmante et débilitante pour les patients. C’est une condition difficile à gérer et elle est souvent associée à des conséquences traumatisantes pour les personnes qui en souffrent ; chez notre patient, la syncope due à la toux a entraîné une suture du cuir chevelu. Il est donc important pour les professionnels de la santé d’évaluer et de rechercher méticuleusement une cause étiologique sous-jacente à la syncope due à la toux, en accordant une attention particulière aux systèmes cardiovasculaire, respiratoire et neurologique, dans l’idée que le traitement de la cause sous-jacente puisse soulager ces épisodes pénibles. En effet, on pense que la toux peut provoquer une syncope par le biais d’une altération de la régulation de la pression sanguine cardiaque ou autonome. Par conséquent, l’évaluation de la syncope due à la toux devrait consister à évaluer l’arrêt sinusal, à évaluer la régulation autonome, à détecter les sténoses de l’artère carotide et à identifier les anomalies du cerveau (en particulier, les défauts structurels du cervelet, comme la malformation d’Arnold-Chiari, qui peuvent contribuer au dysfonctionnement autonome) (tableau 1). Certains chercheurs ont signalé un mécanisme physiopathologique potentiel pour la syncope due à la toux, à savoir qu’une augmentation transitoire de la pression intrathoracique pendant la toux entraîne une réduction de la perfusion cérébrale et, par la suite, une brève perte de conscience17,18. Néanmoins, dans certains cas, la cause étiologique de la syncope due à la toux reste incertaine, de sorte que les patients sont pris en charge avec des traitements antitussifs pour supprimer directement le réflexe sensoriel de la toux.

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Tableau 1.

Causes de la syncope due à la toux

Dans la prise en charge clinique des patients souffrant de toux chronique, divers antitussifs sont utilisés, notamment les opiacés (codéine et morphine), les antagonistes des récepteurs H1 de l’histamine, le dextrométhorphane, la lévodropropizine, le chlophédianol et les anesthésiques locaux. L’antitussif standard accepté, la codéine, est l’un des médicaments les plus largement prescrits pour la toux. Cependant, de multiples essais ont démontré qu’elle est peu efficace pour contrôler la toux.19,20 Les mécanismes par lesquels les antagonistes de l’histone H1 et le dextrométhorphane affectent la toux restent peu clairs. Aucun essai contrôlé par placebo n’a été mené à ce jour sur la lévodropropizine.2 Il a été démontré que le baclofène, un agoniste des récepteurs A de l’acide gamma-aminobutyrique, inhibe la toux induite par la capsaïcine chez l’animal.21,22 Cependant, des essais contrôlés par placebo chez l’homme sont nécessaires pour évaluer l’efficacité de ce médicament. En effet, il existe un important effet placebo chez les patients souffrant de toux.23 Dans l’ensemble, l’échec des traitements actuels est dû aux composantes complexes du mécanisme de la toux et à l’absence de preuves cohérentes d’efficacité.

Dans ce contexte, un récent essai randomisé contrôlé contre placebo portant sur 62 sujets a démontré une amélioration significative de la qualité de vie spécifique à la toux lorsque la gabapentine était utilisée à des doses élevées allant jusqu’à 1 800 mg par jour pendant 3 mois, en comparaison avec un placebo4. La gabapentine est un analogue de l’acide gamma-aminobutyrique qui agit sur les récepteurs B de l’acide gamma-aminobutyrique et les sous-unités α2δ2 des canaux calciques voltage-dépendants.24 Les récepteurs B de l’acide gamma-aminobutyrique sont exprimés dans les poumons et sont impliqués dans la prévention du bronchospasme, de la fuite microvasculaire des voies aériennes et de la toux, et on a constaté que les sous-unités α2δ2 étaient principalement exprimées dans les tissus pulmonaires chez l’homme.25 On pense que la gabapentine se lie aux sous-unités α2δ dans le système nerveux central. L’augmentation de l’hypersensibilité laryngée est une constatation reconnue chez les patients atteints de toux chronique, et il a été proposé que la gabapentine puisse agir comme un agent analgésique dans la toux inflammatoire ou neuropathique.26 En effet, les effets du médicament sur le système nerveux périphérique sont soutenus par son efficacité dans la toux associée à la neuropathie sensorielle.27

Les effets indésirables sont une considération importante pour toutes les interventions thérapeutiques. Dans l’essai contrôlé randomisé de Ryan et al,4 des doses élevées de gabapentine (1 800 mg) ont amélioré la qualité de vie spécifique à la toux, mais 31 % des sujets ont présenté des effets secondaires qui ont nécessité une réduction de la dose ou l’arrêt du traitement. Les principaux effets rapportés étaient les nausées, la fatigue et les vertiges. En revanche, des doses plus faibles de gabapentine ont été utilisées par des chercheurs précédents avec de bons résultats. Mintz et Lee28 ont décrit les résultats cliniques de la gabapentine chez 6 sujets féminins qui ont été traités avec des doses plus faibles du médicament allant de 100 à 800 mg deux fois par jour. À l’instar de notre patiente dans ce cas d’école, 5 des 6 sujets de l’étude ont présenté une résolution complète ou une amélioration substantielle de la toux sous traitement à faible dose ; toutefois, les résultats de cette étude ne sont pas concluants, car seuls quelques sujets féminins ont été recrutés. Van de Kerkhove et al29 ont récemment montré une amélioration des symptômes de la toux avec des doses plus faibles de gabapentine (600 mg deux fois par jour). Nous avons pu traiter et contrôler complètement la syncope due à la toux de notre patient avec une très faible dose (200 mg) de gabapentine après avoir essayé sans effet de nombreux traitements standard contre la toux. Les effets de la gabapentine sur l’amélioration de sa qualité de vie étaient clairement évidents, et notre rapport présente un message important à l’intention des médecins praticiens : ils doivent envisager d’utiliser des doses initiales plus faibles de gabapentine, puis d’augmenter progressivement la dose, d’autant plus que l’efficacité peut être obtenue avec une dose beaucoup plus faible que dans les essais cliniques rapportés. Cette approche permettra également de minimiser potentiellement les effets secondaires causés par le médicament. Dans notre clinique, notre approche consiste à prescrire une dose initiale de 100 mg de gabapentine par jour, puis à augmenter la dose de 100 mg par jour toutes les 2 semaines jusqu’à ce que le patient dérive une amélioration subjective de la toux, auquel moment, la dose est maintenue.

En résumé, notre cas d’enseignement décrit une syncope de la toux résultant d’une toux chronique intraitable comme une condition débilitante affectant la qualité de vie de notre patient. Notre cas illustre le fait que la toux chronique idiopathique peut être contrôlée à une dose significativement plus faible de gabapentine par rapport aux essais cliniques récemment publiés, ce qui constitue un message important pour les professionnels de la santé. Cette observation devrait servir de base à de nouvelles recherches universitaires sur l’étude des effets mécanistes du médicament à des doses plus faibles. En effet, la dose de gabapentine nécessaire pour contrôler la toux chronique en clinique peut être tout à fait différente et peut-être, comme nous l’avons montré, plus faible par rapport à la dose plus élevée indiquée sous licence établie utilisée pour le contrôle de la douleur neuropathique et de l’épilepsie.

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